Poème 51, Poésies, Catulle (1)
Texte :
1 Ille mi par esse deo videtur,
Ille, si fas est, superare divos,
Qui sedens adversus identidem te
Spectat et audit
5 Dulce ridentem, misero quod omnes
eripit sensus mihi ; nam simul te,
Lesbia, aspexi, nihil est super mi
<Vocis in ore>
Lingua sed torpet, tenuis sub artus
10 Flamma demanat, sonitu suopte
tintinant aures, gemina teguntur
Lumina nocte.
Otium, Catulle, tibi molestumst ;
Otio exsultas nimiumque gestis.
15 Otium et reges prius et beatas
Perdidit urbes.
Vocabulaire :
ille, illa, illud = il, lui
ego, -, me, mei, mihi, me = je, moi → mi = mihi
par, paris = égal, pareil
sum, es, esse, fui, - = être
deus, i, m. = dieu, divinité
videor, eris, eri, visus sum → videtur = il semble, il paraît
si = si
fas, n. indécl. = ce qui est permis par les lois divines et par les lois naturelles, le juste, le légitime, le licite
supero, as, are, avi, atum = surpasser, dominer, l’emporter sur
divus, i, m. = dieu, divinité
qui, quae, quod = (celui) qui
sedeo, es, ere, sedi, sessum = être assis
adversus (+ acc.) = en face de
identidem = à diverses reprises, sans cesse, continuellement
tu, tu, te, tui, tibi, te = tu, toi
specto, as, are, avi, atum = regarder, observer, contempler
et = et
audio, is, ire, ivi/ii, itum = entendre
dulce = d’une manière douce, agréablement, avec agrément, doucement
rideo, es, ere, risi, risum = rire
miser, era, erum = malheureux
quod = parce que
eripio, is, ere, ripui, reptum = enlever, faire disparaître
omnis, e = tout, chaque
sensus, us, m. = sens
nam = de fait, en effet
simul = aussitôt que, dès que
Lesbia, ae, f. = Lesbie
aspicio, is, ere, spexi, spectum = apercevoir, voir
nihil = rien
super = en plus, de reste
vox, vocis, f. = voix
in (+abl.) = dans, en, sur
os, oris, n. = bouche, gueule
lingua, ae, f. = langue
torpeo, es, ere, -, - = être engourdi, être paralysé, être inerte
tenuis, e = fin, subtil, délicat
sub (+acc.) = sous
artus, uum, m. pl. = articulations, membres
flamma, ae, f. = flamme, feu
demano, as, are, avi, atum = couler, se répandre
sonitus, us, m. = retentissement, son, bruit, fracas
suus, a, um + -pte = son propre, leur propre
tintino, as, are, -, - < tinnio, is, ire, ivi/ii, itum = tinter, crier aux oreilles
auris, is, f. = oreille
geminus, a, um = double, qui fait le couple, qui fait la paire
tego, is, ere, texi, tectum = couvrir, recouvrir
lumen, inis, n. = lumière des yeux, yeux
nox, noctis, f. = nuit
otium, ii, n. = inaction, oisiveté
Catullus, i, m. = Catulle
molestus, a, um = dangereux
exsulto, as, are, avi, atum = être dans des transports de joie
nimium = trop
gestio, is, ire, ivi/ii, - = faire des gestes sous l’empire de la joie, se démener sous l’empire de la joie, avoir des transports de joie, exulter
et…et = et…et
rex, regis, m. = roi, souverain, monarque
prius = plus tôt, auparavant, avant
beatus, a, um = comblé de tous les biens, riche, opulent
perdo, is, ere, didi, ditum = perdre, causer la perte, causer la ruine, causer le malheur
urbs, urbis, f. = ville
Mot à mot :
Il me semble être égal à un dieu, il me semble, si les dieux le permettent, surpasser les dieux, (celui) qui étant assis en face de toi, à diverses reprises te regarde et t'entend riant doucement, (à moi) malheureux [que je suis] parce que cela enlève tous mes sens ; en effet, dès que je t'ai aperçue, ô Lesbie, plus rien de ma voix dans ma bouche ne reste sur ma langue mais elle est engourdie, un feu subtil se répand sous mes membres, mes oreilles tintent de leur propre son, mes deux yeux sont couverts par la nuit. Catulle, l'oisiveté t'est dangereuse ; à cause de l'oisiveté, tu exultes et tu te démènes trop sous l'empire de la joie. L'oisiveté a perdu, avant toi, et les rois et les villes riches.
→ link (traduction définitive: M. Rat, Paris, Garnier, 1931), Itinera Electronica
!!! remarques:
- ille (vers 1) permet ici de lever toute ambiguïté: "il" n'est pas celui d'une tournure impersonnelle ("il paraît que") mais renvoie à une personne en particulier
- mi (vers1-7) est l'équivalent de mihi (datif de ego), forme seconde que l'on retrouve de façon récurrente en poésie
- dans cette version du poème 51 de Catulle, la compréhension a été facilitée en rendant omnis par omnes (vers 5): à retenir donc que -is peut être l'équivalent de l'accusatif pluriel -es
- molestumst (vers 13) est l'équivalent de molestum est (le e est parfois supprimé et -st est accolé à l'adjectif)